Autour des métiers du luxe à Byzance

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Aménagé au cœur du palais impérial, l’atelier monétaire de Constantinople s’est vu réserver l’exclusivité du monnayage d’or dès le IXe siècle. Le nomisma byzantin s’est imposé comme la devise des grands échanges commerciaux sur le marché international. Mais il diffuse aussi l’effigie du souverain au-delà des frontières de l’empire et véhicule l’idéologie impériale selon laquelle l’empereur byzantin est le lieutenant du Christ, représenté au droit de la monnaie, pour faire régner l’ordre céleste sur l’oikouménè, la terre habitée (CdN 016098, CdN 1997-0091, CdN 2000-0046, CdN 1996-0126).

Le volume de la frappe annuelle des monnaies d’or était dicté par la capacité d’approvisionnement en métal précieux et des besoins en numéraire, surtout ceux de l’armée. Au cours du Xe siècle, la production annuelle est estimée à 250 000 nomismata ; au début du XIe siècle, Basile II, qui avait mis la main sur le trésor des Bulgares, aurait légué à son successeur des coffres pleins de 14 400 000 monnaies d’or (!) (CdN 2000-0045), alors qu’on estime le budget annuel impérial du temps de Manuel Ier Comnène (1143-1180) à 7 000 000 d’hyperpères ! En comparaison, celui de Philippe Auguste, roi de France, est estimé, pour 1202-1203, à quelque 200 000 livres, c’est-à-dire 500 000 hyperpères …

L’empereur dispose de ce trésor impérial qu’il doit gérer en faisant preuve de justice et de générosité. Celle-ci se manifeste surtout par des distributions de monnaies d’or et d’argent à ses sujets ainsi qu’à des fondations pieuses, des églises et des monastères. A titre d’exemple, les splendides mosaïques de Sainte-Sophie (CdN 2004-595), faites grâce à des donations impériales successives. Prévues en période de crise en faveur des plus démunis, les largesses impériales sont également organisées à des fins de propagande personnelle lors de fêtes religieuses, de célébrations d’un couronnement, d’un mariage ou d’une victoire militaire. Outre des pièces de monnaies, sont alors offerts des étoffes de soie, des objets d’art, des vêtements de luxe, des domaines ou le revenu de domaines ; tout cela pour récompenser des services exceptionnels des fonctionnaires, pour impressionner ou pour attirer aussi les faveurs des ambassades étrangères.

Parmi les nombreux témoignages des textes littéraires, citons les 200 livres d’or (= 14’400 pièces d’or) distribuées à l’Eglise et à la cour impériale à l’occasion du couronnement de Constantin VII (913), les 1432 miliarèsia (monnaies d’argent, CdN 2000-0042), offerts – entre autres cadeaux – à la princesse Olga, régente de Kiev, en visite à Constantinople en 950, et à sa suite participant au banquet donné par l’impératrice byzantine ; les 100 pièces de soie et autres objets d’art et les 144 000 pièces d’or envoyés par Alexis Ier (1082) à l’empereur d’Allemagne pour demander son aide ; la donation à Sainte-Sophie de 7’200 pièces d’or à l’occasion de l’avènement de Manuel Ier (1143), ainsi que la promesse de distribution de 150 000 monnaies d’or aux familles habitant Constantinople.

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