Autour des métiers du luxe à Byzance

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L’expression est attestée au XIIIe siècle. Et il paraît que le mot « pesant », qui fait spontanément penser au poids (peser)donnant la mesure de la valeur de l’objet – ou de la personne – dont on parle, est en réalité une déformation du terme « besant », qui désignait, dès le Xe siècle, en Occident, la monnaie d’or byzantine, le nomisma. C’est, du reste, le terme que les Occidentaux utilisaient pour désigner leur propre monnaie d’or dès le XIIIe siècle.

L’expression en dit long sur la notoriété et le prestige dont jouissait le nomisma byzantin sur le marché international même après son déclin, à partir du XIIIe siècle. Mais tout aussi intéressante est la déformation que le terme a subi évoquant – inconsciemment – l’importance que relevait pour les Byzantins le juste poids de leur monnaie d’or, symbole par excellence de la puissance séculaire de l’Empire.

Le nomisma, appelé en latin solidus, fut créé par Constantin Ier, en 309, d’un poids théorique de 4,48 g, avoisinant plus tard 4,35/4,30 g avec un taux d’or de 97-99%. La loi contre les fraudeurs enclins à rogner le métal précieux s’avéra vite impuissante à le protéger efficacement. L’empereur Julien, dit l’Apostat (361-363), institua dans chaque ville le zygostate, un magistrat qui, à l’aide d’un poids officiel, l’exagium, contrôlait le poids des sous d’or utilisés par les privés (CdN 032581 bis/278). Il en allait, en effet, non seulement de la crédibilité de la monnaie, seule autorisée à circuler dans l’Empire, mais aussi du bon fonctionnement des échanges et de la justice sociale, étant aussi la seule monnaie acceptée pour les finances publiques elles-mêmes.

Dès lors, un système raffiné s’est développé pour le contrôle du solidus/nomisma et de ses subdivisions, le semissis et le tremissis, à l’aide d’une balance à deux plateaux, habituellement utilisée pour le pesage des médicaments, des épices et des métaux précieux. Une grande variété de poids spécifiquement désignés pour peser la monnaie est conservée.

Objets principalement fonctionnels, les poids n’en sont pas moins souvent des témoins du savoir-faire et du goût de leurs fabricants et usagers.

En laiton, parfois en bronze ou en verre, en forme de boule aplatie, carrés ou ronds fabriqués au tour, gravés et souvent incrustés d’argent, ils appartiennent autant à des privés qu’à des institutions, à des hauts magistrats (CdN 032581 bis/311) comme à des monastères (CdN 032581 bis/317). Les plus anciens sont richement gravés de motifs qui renvoient à l’autorité impériale qui garantit la juste pesée (CdN 061587, CdN 2012-003), par le motif de la croix (CdN 032581 bis/315), qui rappelle, lui, la sacralité de leur fonction, ou tout simplement par la lettre de la valeur monétaire à contrôler (CdN 032581 bis/265, CdN 032581 bis/214, CdN 032581 bis/121, CdN 032541 bis).

La collection des poids du MAH, parmi les plus importantes au monde, a été publiée en 2015. (Matteo Campagnolo, Klaus Weber, Poids romano-byzantins et byzantins en alliage cuivreux. Collections du Musée d’art et d’histoire – Genève).

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