Carte blanche donnée à l'historien de l'art Jean-Hubert Martin, l'exposition Pas besoin d'un dessin revisite la collection du MAH de manière aussi originale que réjouissante. Le parcours d'une vingtaine de salles thématiques inclut un chapitre intitulé "De la bacchanale au bistrot" que le commissaire introduit ainsi dans le catalogue de l'exposition:
"Chaque culture a sa drogue, toujours associée à un culte. La métaphore du sang
du Christ transformé en vin a évité les sacrifices à la chrétienté. Les vendanges dans
l’Antiquité de la laque de Jean Dunand sont idylliques. Le vase grec ne laisse aucun
doute sur les ébats sexuels des bacchanales. Dans la période classique, se développe
une imagerie du raisin, de Bacchus juché sur un tonneau, alors que c’est
plutôt d’une amphore qu’il s’abreuvait, et de faunes au visage bestial qui atteignent
les arts appliqués et l’horlogerie.
En peinture, ce sont tous les épisodes de la vie de Bacchus qui sont détaillés :
son enfance au sein d’un gynécée débauché (Charles Giron), ses noces avec Ariane
(Barend Graat) et sa rencontre avec les Trois Grâces (Noël Nicolas Coypel). En
Hollande, pour traiter du vin et de l’ivresse, on ne s’embarrasse pas de métaphores
mythologiques. La gaité des soirées bien arrosées et les chansons à boire se
trouvent dans des tripots ou des tavernes (Adriaen van Ostade et David Rijckaert).
Sous l’enseigne Au flacon. Bon logis, le vétéran essaie de noyer ses souvenirs des
horreurs de la guerre tout en plaisantant (Louis-Aimé Grosclaude). Il a fait tomber sa
chaise en titubant et son voisin a bien du mal à garder la tête droite (Jean Daniel Ihly).
Tout ce qui sert à boire fait l’objet d’une attention particulière. Une armoire
décline les pichets, brocs, cruches et autres verres, alors qu’à côté figurent les
« cadavres », vestiges d’agapes (Daniel Spoerri, René Guinand). Sans aller jusqu’à
l’extrême du plongeon d’un silène dans une jarre de vin figurant sur une coupe
grecque ou de l’insertion dans une bouteille (Rodolphe Töpffer), les méfaits de l’alcool
et les excès de l’ivresse sont détaillés : vomissement (Hans Sebald Beham),
griserie et endormissement (Félicien Rops), et moines paillards (Francisco de Goya).
Les deux gravures de William Hogarth, Gin Lane et Beer Street, avec leur
pléthore de conséquences catastrophiques et d’empilements chaotiques mettent
en garde contre les excès de l’alcool.
Si la morale s’en mêle et qu’on tente de stigmatiser l’alcoolisme, il n’en reste
pas moins que certains artistes donnent une vision épique de la consommation de
vin depuis Bacchus (Léopold Flameng) et que d’autres célèbrent les plaisirs de la
dégustation, ceux de tirer le vin du tonneau, seul ou avec des amis, et de converser
autour d’une bonne bouteille à la table d’une auberge de campagne, comme
Wolfgang Adam Töpffer."
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