Prononcer son nom, c’est comme ouvrir un atlas illustré : Ella Maillart. D’oasis interdites en voie cruelle, en immersion dans la jeunesse russe ou encore vagabondant sur les mers, elle nous transporte vers l’est proche ou lointain avec son style efficace et sans fioritures. L’exposition du Musée Rath met en avant son œil de photographe, sa démarche archivistique mais présente ses principaux ouvrages fermés. Le programme de rendez-vous autour de l’exposition, par un mouvement inverse, replace les mots au centre. Ceux d’Ella d’abord, ceux d’autres écrivaines et écrivains voyageurs ensuite, ceux écrits sur elles enfin.
La vie et les voyages d’Ella Maillart sont présentés dans une longue vitrine à travers documents d’archives et photographies. Un audioguide permet de se pencher dessus en les mettant en relation avec l’œuvre littéraire, de l’enfance au port d’attache de Chandolin, en passant par les grands voyages : Russie et Caucase, Kirghizstan, de Pékin au Cachemire, vers l’Afghanistan puis le long séjour indien.
Au sous-sol, en complément à la visite, un espace est proposé pour poursuivre le voyage. On y trouve l’évocation de la bibliothèque d’Ella Maillart de ses lectures de jeunesse - Jules Verne, Jack London - aux ouvrages qu’elle utilisait pour préparer les voyages accompagnés durant lesquels elle guidait - à quatre-vingts ans passé encore – des touristes en mal d’aventure. S’y ajoutent des ouvrages plus récents, écrits après sa mort mais qui font écho tant à son œuvre que sa bibliothèque avec des auteurs comme Blaise Hoffman, Sylvain Tesson ou François-Henri Désérable. Une visite au Rath suffit à confirmer le succès de cet espace qui invite au voyage… il ne désemplit pas.
En collaboration avec le Théâtre de Carouge, en janvier, une visite-lecture a permis de mettre en résonnance l’œuvre d’Ella Maillart et celle de Nicolas Bouvier, autour de L’Usage du monde, la pièce adaptée et interprétée par Samuel Labarthe à partir de l’ouvrage éponyme. Une amitié profonde noue les deux voyageurs qu’une génération sépare. Il préface La vie immédiate, le catalogue de l’exposition organisée à Lausanne, et participe à la sélection des images quand Ella dépose à Photo Elysée son fond d’archive photographique. Ce texte hommage plein d’humour et de tendresse est republié dans Regards sur Chandolin. Samuel Labarthe en fait la lecture, en même temps qu’il apporte sa connaissance et son regard passionné sur les deux écrivains voyageurs.
Samuel Labarthe le dimanche 14 janvier au Musée Rath.
L’Association des Amis d’Ella Maillart, qui alimente un site très riche et fait vivre une exposition consacrée à l’écrivaine voyageuse à Chandolin, a choisi de mettre à l’honneur deux autrices qui ont écrit récemment sur Ella Maillart. Bridget Dommen, spécialisée dans les ouvrages illustrés pour la jeunesse sur les personnalités ayant marqué l’histoire de la Suisse et de Genève, présente l’ouvrage Ella Maillart Dans la tourmente du 20ème siècle, publié chez Cabedita en 2020. Avec Carine Bertola, sociologue ancienne conservatrice du Musée du Léman, c’est la « vagabonde des mers » qui est à l’honneur, dans le cadre de la sortie de son ouvrage Ella Maillart navigatrice. Libre comme l’eau, un véritable journal de bord mêlant textes et photographies. Une manière de remettre à sa juste place la grande navigatrice dont on a trop longtemps minimisé les exploits sportifs.
En avril 2023, naissait un nouveau rendez-vous thématique avec la journaliste Céline Argento : MAH Balade littéraire. Une fois par mois, des auteur.ice.s sur un thème donné, viennent évoquer leur dernière publication et dialoguer, dans une salle du musée. Chaque séance est introduite par la présentation d’une œuvre de la collection qui fait écho au thème. L’exposition du Rath était une occasion à ne pas manquer pour évoquer la littérature de voyage. Blaise Hofmann est ainsi venu évoquer ses voyages, et les livres qui en sont nés. Face à lui, l’artiste Marianne Herjean est venue présenter Dans tes chevaux. Voyage en Iran ou comment le voyage impacte la création artistique, le récit d’un voyage terrestre à travers huit pays, de Genève à Téhéran. Marianne pratique la danse soufie, Blaise a justement un texte qui en décrit une : ni une, ni deux, les voilà qui improvisent en fin de rencontre une lecture-dansée !
Blaise Hofmann et Marianne Herjean improvisent une lecture-dansée le 11 février 2024 au Musée Rath.
Pour le jeune public, c’est aussi l’angle de la littérature qui a été choisi avec un rendez-vous mêlant livre jeunesse et collection ou exposition, le mini-club de lecture, destiné aux enfants dès 6 ans accompagné d’un adulte. Il est bien sûr question, entre autres du Fabuleux destin d’Ella Maillart. Découverte ludique de l’exposition, lecture et présentation de livres autour du voyage étaient au menu de cette rencontre du mercredi 6 mars.
Et pour finir en beauté ce tour d’horizon du programme autour de l’exposition, Pauline Julier et Anne-Julie Racrousier qui partagent l’affiche avec l’autrice voyageuse, ont dialogué à bâton rompu avec visiteurs et visiteuses le dimanche 3 mars.
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