Cercueil, fragment

XXIe dynastie
Couleurs
CETTE ŒUVRE EST EXPOSÉE AU Musée d'art et d'histoire

Description

Cercueil, fragment
Titre
Fragment de cercueil au nom de la chanteuse d'Amon Tanetnakht... (?)

Datation
XXIe dynastie
Lieu de création
Thèbes, Louqsor (?)
Dimensions
haut. max.: 26.5 cm à droite du fragment
haut.: 24 cm à gauche du fragment
long. max.: 109 cm en ligne droite
long. max.: 113.00 cm courbure
ép.: 4.3 - 4.7 cm bord supérieur
ép.: 1.6 - 2.2 cm bord inférieur
prof.: 15 cm encombrement
Matériaux
Bois, stuc peint, peinture ocre jaune (fond), ocre rouge, vert clair, vert-bleu foncé, noire. Forme : paroi latérale gauche de la cuve d'un cercueil anthropoïde et momiforme (cou, épaule, flanc), bord supérieur présente un décrochement pour accueillir le couvercle, deux mortaises rectangulaires le long du bord supérieur pour fixer un couvercle au moyen de tenons aujourd'hui manquants, dont l'une des deux présente encore une petite cheville transversale pour bloquer le tenon, deux mortaises cylindriques le long du bord inférieur pour assembler cette paroi au fond du cercueil, une mortaise sur le petit côté droit
Mention obligatoire
MAH Musée d'art et d'histoire, Ville de Genève. Legs Jacqueline Porret-Forel, 2015
Numéro d'inventaire
A 2016-0014

Description
Ce fragment est caractéristique des cercueils anthropomorphes qui accompagnaient les défunts au début du Ier millénaire avant notre ère. Éléments essentiels du trousseau funéraire, leurs parois sont couvertes de scènes mythologiques qui invitent leurs propriétaires à se mouvoir dans l’au-delà complexe imaginé par les anciens Égyptiens, à s’associer au dieu Osiris ou au dieu solaire et à participer ainsi à la perpétuation de la création. La vignette centrale représente les origines divines de l’univers, montrant un premier couple primordial : la terre personnifiée par le dieu Geb, dont le corps vert est étendu sur le sol, et la déesse du ciel, Nout, nue et arcboutée au-dessus. Ils sont séparés par une divinité aux bras levés, incarnation de l’air.Récemment entré à l’inventaire du Musée d’art et d’histoire, ce fragment de cercueil (inv. A 2016-14) nous a été légué par Mme Jacqueline Porret-Forel (1916-2014), éminente spécialiste et active promotrice de l’art brut. Aux dires de la donatrice, il aurait jadis fait partie des collections rassemblées par François Tronchin au XVIIIe siècle. Ce fragment correspond au côté gauche de la cuve d’un cercueil anthropoïde. Sa forme épouse les contours du cou, de l’épaule et du flanc. La défunte Ce cercueil fut préparé pour une femme, dont la titulature et le nom apparaissent à trois reprises sur le fragment conservé. Elle y est présentée comme une « maîtresse de maison et chanteuse d'Amon » à deux occasions ; une variante la qualifie de «chanteuse d'Amon-Rê-sonther [= Amon-Rê roi des dieux]». Son nom a été volontairement gratté à une période et pour des raisons qui demeurent inconnues. Dans deux occurrences, le début est toutefois parfaitement lisible: «Ta-net-...»; les bribes d’un signe hiéroglyphique qui le suivait permettent d’envisager une lecture Ta-net-nakht (ou Ta-net-nakht-…), « Celle du victorieux », nom attesté à la Troisième Période intermédiaire, datation que confirment également le style et l’iconographie du décor, typique de la XXIe dynastie (XIe–Xe siècle av. J.-C.) et des cercueils préparés pour les membres du clergé d’Amon à Thèbes (Louqsor) à cette époque. Ses fonctions la rattachent à la classe aisée de la population. Iconographie et textes Les contours des figures sont tracés à l’aide d’un trait rouge, ferme, sans repentir apparent. Au niveau de l’épaule est figuré le dieu Thot à tête d’ibis, vêtu d’un pagne plissé jaune à rehauts rouges et verts auquel est accrochée une queue cérémonielle. Dans son rôle de pilier du ciel, il tient le signe de l’Occident et un ruban. Derrière lui sont inscrites trois colonnes d’hiéroglyphes, extraites du chapitre CLXI du Livre des Morts : «Paroles à prononcer par Thot, maître des paroles divines, scribe de Maât, à l’Énéade [= compagnie divine] : (2) ̒Que vive Rê, que meure la tortue ! Indemne est celui qui repose dans [ce] sarcophage. (3) Indemne est l’Osiris [= la défunte] maîtresse de maison et chanteuse d’Amon Ta-net-nakht-…’». Représentation du cosmos Au milieu de ce fragment, à hauteur du bras gauche de la défunte, prend place une représentation du cosmos. Le dieu Geb, personnification de la terre, figuré nu mais le cou paré d’un large collier, est étendu sur le dos, son visage regardant vers le bas. Trois hiéroglyphes inscrits devant sa face le nomment. Son corps est peint en vert, expression de la fertilité, à l’exception du collier, de sa perruque et de sa barbe. Au-dessus de lui est arc-boutée la déesse du ciel Nout, nue, la tête tournée vers la droite : son image est délimitée par un trait rouge et son corps n’est pas coloré, si ce n’est sa perruque. Frère et sœur, mais aussi mari et femme, Geb et Nout sont les parents d’Osiris, Isis, Seth, Nephthys et Horus, mais leur union charnelle est compromise par leur père, le dieu Chou, représenté entre eux, les deux bras levés, dans sa fonction de colonne d’air qui sépare terre et ciel. Sa tête est coiffée d’une perruque et d’une plume qui l’identifie. À gauche de la scène, est montré un bélier sur une enseigne. Devant cet ovin, brûle un encensoir ; un œil-oudjat (intégrité) surmonte l’animal. Au vu de sa position, à l’arrière de Nout, il doit symboliser l’Orient et la naissance du soleil. À l’autre extrémité, une seconde enseigne accueille un faucon, sommé d’un flagellum déployé dans son dos. Un cobra se dresse devant ses serres. Le rapace et son perchoir sont une écriture du mot « Occident » où se situent les nécropoles. Cette iconographie est l’illustration de la création et de la permanence du monde selon la théologie d’Héliopolis, l’un des plus importants centres religieux de l’Égypte pharaonique. On imaginait en effet un démiurge solitaire ayant créé un premier couple (air et humidité) qui donna naissance à la terre et au ciel, puis à leurs cinq enfants dont le rôle mythologique aura moins de liens directs avec le cosmos. Un autre mythe affirme que Nout met au monde chaque matin le soleil, et qu’elle l’avale au soir. Cette scène est complétée par d’autres symboles plus strictement funéraires, sans doute incorporés dans les espaces laissés libres par cette horror vacui caractéristique de l’iconographie des cercueils égyptiens contemporains. De part et d’autre de Chou, au-dessus de Geb, sont figurés symétriquement des canidés couchés, tournés vers le centre de la représentation ; devant leurs pattes antérieures se dresse un sceptre où est suspendue une paire de contrepoids de collier (symbole osirien). Sous la figure animale de droite, au-dessus des jambes de Geb, s’observent différents signes prophylactiques : deux signes-nefer (perfection), un œil-oudjat (intégrité) pourvu de bras en adoration, qui surmonte une corbeille-neb (totalité) et un anneau-chen (universalité). Jugement des morts Sur la gauche prenait place une longue vignette détaillant la pesée du cœur de la défunte lors du jugement des morts. Dans une chapelle surélevée trône Osiris légendé par l’une de ses épithètes (« celui de l’Occident »); il est suivi d’Isis et de Nephthys debout derrière lui. Différents accessoires, symboles ou génies funéraires sont figurés devant eux. Au pied de l’estrade se remarque la « dévoreuse », monstre hybride prêt à engloutir définitivement l’impétrant qui ne serait pas reconnu juste lors de cette épreuve. Moins bien conservées, s’observent encore des traces du dieu Thot (greffier de l’opération), les jambes de la défunte, le plateau de la balance sur lequel son cœur est posé et le pied de cet instrument.

PLUS D’INFORMATIONS SUR L’OEUVRE

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Collection(s)
Egypte et Nubie
Mobilier et architecture
Période
Antiquité
Inscriptions
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, derrière Thot, 3 colonnes, lecture de gauche à droite, extraits du chapitre CLXI du Livre des Morts, trad. J.-L. Chappaz : Paroles à prononcer par Thot, maître des paroles divines, scribe de Maât, à l’Énéade : ’Que vive Rê, que meure la tortue ! Indemne est celui qui repose dans [ce] sarcophage. Indemne est l’Osiris maîtresse de maison, chanteuse d’Amon Ta-net-nakht-…’
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, derrière Thot, 2 colonnes, lecture de droite à gauche, trad. J.-L. Chappaz : Paroles à prononcer par Osiris, maître de l’éternité, qui préside [à l’Occident], Ounnefer, gouverneur des deux terres, […] : ‘Que vive la vie (? = deux signes-ânkh notés côte-à-côte) de l’Osiris maîtresse de maison, chanteuse d’Amon Ta-net-nakht-…, juste de voix’
inscription hiéroglyphique, peinte en vert, bleu et ocre rouge, au-dessus de Thot, 1 ligne, lecture de gauche à droite, légende du dieu, trad. J.-L. Chappaz : Thot, maître des paroles divines
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, à gauche de Geb, 1 ligne, lecture de gauche à droite, légende du dieu, trad. J.-L. Chappaz : Geb
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, entre la vignette du cosmos et celle du jugement des morts, 3 colonnes, lecture de gauche à droite : à compléter
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, vignette du jugement des morts, 4 légendes au-dessus des divinités, lecture de gauche à droite ( : Behedet (?), Imentet (?), Isis, Nephthys
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, au dessus de la dévoreuse, une colonne lacunaire dont il ne reste que le bas, lecture de gauche à droite
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, au dessus de Thot, deux colonnes lacunaires (au minimum) dont il ne reste que le bas, lecture de droite à gauche : Thot ...
inscription, peinte en vert, bleu et ocre rouge, sous la balance, une colonne, lecture de gauche à droite : Mȝa (Juste)

Bibliographie

Bibliographie

Marin Jean-Yves, MAH : Les Collections du Musée d'art et d'histoire de Genève, Genève: Musée d'art et d'histoire, 2019, p. 39

Chappaz Jean-Luc, À propos d'un fragment de cercueil égyptien : les errances de deux inconnues (ou presque), Genava, n.s., t. 65, 2017, p. 9-18, p. 9-18

Niwinski Andrzej, 21st dynasty coffins from Thebes : chronological and typological studies (Theben V), Mainz am Rhein, Philipp von Zabern, 1988, p. 85

Seeber Christine, Untersuchungen zur Darstellung des Totengerichts im Alten Ägypten (MÄS 35), Berlin, Müncher Ägyptologische Studien, H. 35, 1976, pp. 83-88, part. 83-85, 101-110

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