La Médiation culturelle du MAH s’est vite emparée de ces liens manifestes entre art et danse: Lucy Nightingale, formée au Royal Ballet de Londres, travaille directement avec une médiatrice lors de visites sur mesure pour les familles, explications et chorégraphies s’entremêlant dans les salles beaux-arts ou les accrochages temporaires. Entre médiation et performance, la danse prolonge les corps et anime des scènes figées par les artistes.
Une recherche expérimentale
Christine D’Andrès, chorégraphe, danseuse et ergothérapeute, s’intéresse de près aux liens entre mouvement, corps et arts visuels. Mais son travail ne consiste pas à répondre aux émotions exprimées par les œuvres. Christine D’Andrès déambule dans les salles et se laisse aspirer, séduire ou repousser par les objets d’art qui rythment son chemin. La voilà qui se met à bouger devant La Vague (1907) de Carlos Schwabe, qui dépose des vêtements devant Vénus et Adonis (1795) d’Antonio Canova, puis qui revêt les robes et autres chemises laissées sur son passage pour prolonger son approche des œuvres.
Se focalisant sur ses propres émotions, elle se laisse absorber par les images et exprime son ressenti par le geste ou en restant parfaitement immobile.
Les publics ne sont pas invités à venir découvrir son travail à proprement parler. C’est par hasard qu’ils croisent cette femme à la longue chevelure, immobile ou animée, devant les paysages de Ferdinand Hodler. Certains restent et l’observent, d’autres se précipitent vers le gardien pour en savoir plus, d’autres encore passent leurs chemin sans la voir…
Christine D’Andrès explique son travail: «Pour mieux comprendre ce dialogue entre arts visuels et danse, pour mieux l’appréhender et pour pouvoir l’insérer dans mes prochaines créations, il me faut l’éprouver. Pour comprendre ensuite ce que j’ai traversé et pour m’aider à mener une réflexion approfondie sur le sujet, j’ai besoin de m’entourer d’artistes qui apporteront leur propre éclairage. Nous confronterons ainsi nos idées, nos savoirs, nos vécus, nos regards artistiques variés; ils bousculeront peut-être quelques-unes de mes certitudes; ils me diront ce qu’ils ont perçu de ma traversée en résonance avec les œuvres et nous écrirons ensemble un carnet de bord de tout le processus.»
Pendant deux heures, on l’observe regarder et réagir aux œuvres. Parfois même, on se demande qui regarde qui – comme si Hodler, au regard sévère dans ses autoportraits, s’autorisait un sourire en la surprenant en train de le dévisager. Car les œuvres se transforment à son approche: nous croyons souvent tout savoir de la collection, des auteurs, des techniques, des contextes artistiques mais les gestes de Christine D’Andres ouvrent d’autres dimensions, révèlent des émotions inédites.