Elyx en balade au Musée d’art et d’histoire

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Le personnage de Yak en roue libre dans les salles du musée

Sans doute connaissez-vous ce personnage, apparu il y a quelques années sur les réseaux sociaux: Elyx, créature tout droit sortie de l’imagination du dessinateur et designer graphique Yacine Aït Kaci, alias Yak. Depuis 2011, Elyx partage son quotidien tel un Buster Keaton moderne; sans un mot, il transmet des émotions universelles. Modeste par la taille, grand par l’engouement qu’il suscite, le petit bonhomme peut aujourd’hui se targuer d’être suivi par 122 000 abonnés sur Instagram et 6 400 abonnés sur Twitter. Ambassadeur digital de l’ONU depuis 2015, Elyx et son créateur ont répondu à l’invitation du Musée d’art et d’histoire de Genève pour une balade dans ses salles.

Comment avez-vous envisagé cette visite au Musée d’art et d’histoire? Avez-vous procédé à un repérage des lieux en amont ou vous êtes-vous laissé aller à une parfaite spontanéité?

Mon travail est basé sur le principe de la rencontre. J’essaye d’avoir le moins de connaissances préalables, car de cette improvisation vont naitre des situations spontanées dont je vais être le premier surpris. Mon souhait est de faire partager cette surprise avec le public. Une fois concentré, je me laisse guider par le contexte. Je savais quelles étaient les grandes lignes de force des collections du Musée d’art et d’histoire, mais Elyx, lui, découvrait le musée. J’ai fait une première visite rapide pour appréhender les espaces, et les graines d’inspiration ont, au fil de la journée, fini par germer. Après plusieurs passages et jusqu’aux dernières minutes avant la fermeture, les idées ses sont mises à exploser – avec quasiment une œuvre, une photo –, comme du popcorn !

Elyx se reflétant dans Le Lac de Thoune aux reflets symétriques (1909) de Ferdinand Hodler ©Yak
Elyx se reflétant dans Le Lac de Thoune aux reflets symétriques (1909) de Ferdinand Hodler ©Yak

Y-a-t-il une œuvre ou une salle qui vous ont inspiré particulièrement ?

Je dirais les salles de peintures impressionnistes et les salles d’archéologie et d’histoire, que j’adore et qui me rappellent celles du musée du Louvre, que je connais particulièrement bien pour y avoir travaillé il y a longtemps. D’une manière générale, les dessins du carnet sont le fruit du hasard et dépendent du contexte (la position, la perspective, la lumière…) et ne sont possibles qu’à un endroit et à un moment précis. Au MAH, Elyx sort la tête d’une amphore antique exposée au sous-sol, il se déguise en magicien pour couper en deux une statue fendue au milieu… L’image raconte à la fois l’œuvre et le jeu auquel l’on aimerait se prêter en tant que visiteur. Elyx révèle ce type de pensées vagabondes que l’on peut avoir en visitant un musée, dans lequel l’imaginaire est extrêmement sollicité.

Elyx sortant discrètement d’une amphore à huile antique (Ier siècle av.J.-C.-IIe siècle), découverte à Rome ©Yak
Elyx sortant discrètement d’une amphore à huile antique (Ier siècle av.J.-C.-IIe siècle), découverte à Rome ©Yak

Que vous a inspiré cette découverte du Musée d’art et d’histoire ?

Sa richesse est extrêmement surprenante. Être nez-à-nez avec un Cézanne, un Monet ou Picasso et quelques minutes plus tard se retrouver avec un sarcophage antique… Au MAH, j’ai retrouvé cette sensation de voyager sur place que j’apprécie tellement quand je visite le musée du Louvre. Ce rapport entre l’art et l’histoire, ce moment de basculement lorsque des œuvres historiques deviennent des œuvres d’art est une chose rare. Les musées à avoir un tel spectre de proposition pour le public ne sont pas légion.

Elyx se prend pour un magicien devant un sarcophage du Ier siècle av. J.-C., découvert à Cerveteri (Italie) ©Yak
Elyx se prend pour un magicien devant un sarcophage du Ier siècle av. J.-C., découvert à Cerveteri (Italie) ©Yak

On a vu le personnage Elyx se balader au musée du Louvre, au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, dans les Galeries nationales du Grand Palais ou encore à la Maison européenne de la photographie à Paris. Les musées sont-ils des espaces privilégiés pour Elyx?

Depuis sa création, Elyx a toujours été très proche du monde de la culture et des musées, et a répondu à de nombreuses sollicitations. Lui-même étant une création artistique et un personnage graphique, il peut très facilement communiquer avec les œuvres, agir tel un médiateur entre le spectateur et l’œuvre.

Elyx inspiré par l’Allégorie de la Foi (v. 1517-1520), fresque d’Innocenzo di Pietro Francucci ©Yak
Elyx inspiré par l’Allégorie de la Foi (v. 1517-1520), fresque d’Innocenzo di Pietro Francucci ©Yak

Vous faites la comparaison entre votre démarche et celle des impressionnistes qui sortaient de l’atelier pour travailler sur le motif. Elyx apparait beaucoup en extérieur, mais ce vagabondage dans les salles de musée n’est-il pas une contradiction ?

Il s’agit en réalité d’une boucle. Les peintres impressionnistes sont sortis de leur atelier pour capter le réel sur toile, et ces tableaux ont eux-mêmes rejoint les musées. La démarche s’apparente à capter un morceau de l’extérieur pour le ramener à l’intérieur. Ma pratique, que je conçois comme du «street art digital», renvoie à cette démarche, dans le sens où je vais dans la rue capter des moments de réel. Elyx jouit d’une grande liberté, car il peut se trouver à l’intérieur comme à l’extérieur. Ce retour au musée, face à ces œuvres qui ont ce lien avec l’extérieur, n’est qu’une étape de cette boucle. Car in fine, les images d’Elyx jouant avec les œuvres peuvent se regarder partout – dedans, dehors, sur son téléphone portable, sur les réseaux sociaux… C’est la nouvelle libre circulation de la création, tant dans le temps que dans l’espace.

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