Dossier: La salle des antiquités romaines 3

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Les textes publiés dans la rubrique «pédagogie» de ce blog proposent, entre autres, aux enseignants des pistes de travail permettant une (re)découverte de l’institution et de ses fonds. Dans cette perspective, nous consacrons un premier dossier à la salle des antiquités romaines, complètement rénovée il y a moins de deux ans. Ce troisième article fait suite à l’introduction des grands thèmes sur lesquels la présentation est construite et à un billet consacré à la grande sculpture. Place aujourd’hui aux portraits!

Au propre comme au figuré, les portraits occupent une place de choix dans la collection des Antiquités romaines du Musée d’art et d’histoire: leur présentation en galerie forme l’axe chronologique de la salle; par leur nombre et leur qualité, ils constituent le plus important ensemble de portraits romains d’époque impériale en Suisse.

Le portrait, un emblème de la romanité

Dans l’Antiquité classique, l’origine du portrait tendant au réalisme est assurément italique. Indépendamment des sarcophages en terre cuite étrusques par exemple, où le défunt est représenté allongé sur le couvercle, ou encore de célèbres sculptures d’époque républicaine, les textes évoquant les coutumes romaines sont riches en enseignements sur le rôle et l’usage des portraits. Ainsi Polybe (env. 202-120 avant J.-C.), historien grec qui vécut de nombreuses années à Rome, nous signale l’importance des portraits, en l’occurrence lors des funérailles d’un personnage illustre: «Après l’enterrement et la célébration des rites, on place l’image du défunt à l’endroit le plus en vue de la maison, dans une châsse en bois. Cette image est un masque d’une extrême ressemblance, tant pour le modelé que les couleurs.» (Histoires,53, 4 et 5). Pline l’Ancien, mort lors de l’éruption du Vésuve en 79 après J.-C., rapporte à son tour des traditions de ses ancêtres: «Dans les atriums on exposait un genre d’effigies, destinées à être contemplées: non pas des statues dues à des artistes étrangers ni des bronzes ou des marbres, mais des masques moulés en cire, qui étaient rangés chacun dans une niche: on avait ainsi des portraits pour faire cortège aux convois de famille et toujours, quand il mourait quelqu’un, était présente la foule entière de ses parents disparus; et les branches de l’arbre généalogique couraient en tous sens, avec leurs ramifications linéaires, jusqu’à ces portraits, qui étaient peints.» (Histoire naturelle,35, 6).

La ressemblance entre les portraits conservés et les personnes qu’ils sont censés représenter est bien sûr impossible à évaluer. Force est de constater cependant que les Romains ont entretenu un goût pour les détails physionomiques réalistes, bien loin des représentations idéalisées grecques des époques classiques et hellénistiques.

La salle romaine présente un certain nombre de portraits funéraires, dont la célèbre série des stèles de Palmyre, reliefs destinés à la fermeture de tombes. On y trouvera les sculptures de femmes et d’hommes, honorés par leurs attributs et immortalisés par leur image dans la pierre, d’ailleurs souvent assorties d’une inscription gravée, elles aussi destinées à franchir les siècles.

Le portrait impérial, reflet du pouvoir du premier citoyen de Rome, le Princeps

Cette tendance au réalisme doit être nuancée en ce qui concerne les portraits d’empereur. En effet, les effigies de ces derniers sont des images officielles. Elles doivent faire connaître le Princeps dans toutes les provinces de l’empire, véhiculer, par leur aspect, les valeurs que celui-ci prône tout en mettant en évidence le caractère quasi divin du sujet représenté. Le culte impérial est en effet un des fondements de la vie religieuse romaine des premiers siècles de notre ère.

Ces prérogatives impliquant la reconnaissance du personnage sculpté permettent aux archéologues d’ordonner la plupart des portraits d’empereurs dans de véritables typologies. La présentation de la section romaine du musée met bien en évidence cette riche thématique. En effet, au bas de chaque buste ou portrait, des monnaies et autres pierres gravées représentant le personnage sculpté, ou ses contemporains, réaffirment la force officielle de l’image véhiculée.

Anonymes, empereurs et impératrice

Aux côtés des anonymes témoignant du goût pour une représentation prestigieuse dans la sphère privée, les empereurs sont majoritaires dans la section, à commencer par Auguste lui-même, dans un type inspiré par celui dit de Prima Porta, en référence à la célèbre statue de Rome.

Buste de l’empereur Marc Aurèle, entre 161 et 169, inv. 19050, © MAH, photo: MAH

Ses successeurs aux rênes de l’empire sont nombreux à figurer dans la présentation: de Néron à Septime Sévère, en passant par Trajan, Marc Aurèle ou encore Commode, les portraits du musée permettent d’approcher les plus hauts dignitaires romains des trois premiers siècles de notre ère. La présentation permet également de noter de fortes particularités, comme «classicisme» des représentations d’Auguste ou la barbe grecque de Marc-Aurèle, signalant son attachement à la philosophie. Elle offre aussi un bel aperçu de l’évolution de la sculpture des élites, sur près de 300 ans.

Au terme de cette rapide présentation, une mention particulière doit assurément être réservée au portait de Pompeia Plotina, épouse de l’empereur Trajan: il s’agit d’un véritable chef-d’œuvre, pratiquement conservé dans son intégralité. Et ce n’est pas tout: non seulement son contexte de trouvaille est connu, mais Plotine est l’une des impératrices dont les textes anciens parlent le plus. D’aucuns prétendent qu’elle y serait pour beaucoup dans la nomination d’Hadrien à la succession de Trajan. Les rumeurs courent toujours…

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