Samedi 9 novembre, le Musée d’art et d’histoire et l’Université de Genève se sont associés pour organiser une journée d’études consacrée à Constantin le Grand. Cette manifestation, marquant les 1700 ans de la proclamation de l’édit de Milan (édit de tolérance envers la religion chrétienne en 313), s’inscrivait également dans le cadre de l’exposition Héros antiques. La tapisserie flamande face à l’archéologie, au Rath, qui ouvrira ses portes le 29 novembre prochain. Sept tapisseries monumentales du XVIIe siècle mettront en scène, entre légende et histoire, des hauts faits du règne de Constantin.
Entre mythe et réalité
Comment extraire la réalité de la légende construite autour de ce personnage emblématique? Les trois premières interventions de la matinée se sont intéressées aux problèmes historiographiques posés par les principales sources traitant de la vie de l’empereur. Frédéric Amsler, professeur de théologie à l’Université de Lausanne, a montré la fragilité des sources écrites rapportant la vision de Constantin avant la bataille du pont Milvius, à travers l’analyse de l’œuvre de Lactance. Il s’est en outre efforcé de démythifier la figure de Constantin, replaçant notamment sa «conversion» dans le contexte politique, religieux et civique de l’époque.
Eric Junod, professeur honoraire de l’Université de Lausanne, s’est penché sur les écrits de l’historien chrétien Eusèbe de Césarée (né vers 265, mort en 339), chargé de la biographie de Constantin et peu objectif dans ses propos envers l’empereur.
Le professeur honoraire François Paschoud conclut cette triade historiographique par une image non officielle de l’empereur. Il évoqua surtout Zosime, historien païen du Ve siècle, auquel il y a consacré des années de travail, mais également les Césars, œuvre de Julien dit l’Apostat, successeur et parent de Constantin. À noter que, dans le cadre de l’exposition Héros antiques, une lecture de cette satyre par des personnalités genevoises sera proposée au public le 2 février 2014.
Constantin, sous toutes les coutures
Durant la deuxième partie de la matinée, Manuela Studer, de l’Université de Fribourg, a présenté ses recherches sur les nouveautés iconographiques des sarcophages de l’époque constantinienne. Son intervention a suscité de nombreuses questions, prouvant que l’archéologie séduit toujours autant!
L’après-midi a débuté avec la communication de Matteo Campagnolo, conservateur du Cabinet de numismatique du Musée d’art et d’histoire, qui a présenté une série de monnaies de l’époque constantinienne en analysant leur iconographie, tout particulièrement la représentation du chrisme.
Chercheur à l’Université de Fribourg, Patrick Andrist a ensuite abordé le domaine complexe de la codicologie en se penchant sur la commande de cinquante manuscrits du Nouveau Testament par Constantin à Eusèbe de Césarée.
Professeur de droit et de rhétorique à l’Université de Genève, Gabriel Aubert a quant à lui choisi d’analyser un discours anonyme, daté de 313, à la gloire de l’empereur chrétien. M. Aubert n’a d’ailleurs pas hésité à rappeler que les figures rhétoriques classiques sont toujours employées de nos jours par nos hommes d’État.
Christophe Schmidt, qui enseigne l’histoire ancienne à l’Université de Genève, a emmené le public au cœur des innovations et des réformes militaires voulues par l’empereur.
La bataille du pont Milvius
La conférence du professeur Jan Blanc (Université de Genève) a conclu cette dense et intéressante journée interdisciplinaire en invitant le public nombreux à regarder le tableau de Pieter Lastman La Bataille du Pont Milvius (1613). Cette peinture offre un trait d’union idéal avec l’exposition Héros antiques. La tapisserie flamande face à l’archéologie, dans laquelle le public pourra admirer une tapisserie au sujet similaire, mais aux choix iconographiques quelque peu différents.