
EL LISSITZKY ET L’AVANT-GARDE RUSSE
Le MAH conserve un fonds remarquable d’œuvres graphiques de l’avant-garde russe, un courant influent d’art moderne et regroupant plusieurs mouvements artistiques, tel que le suprématisme. Parmi les figures majeures de l’avant-garde russe, Lazar Markovitch Lissitzky (1890-1941), dit El Lissitsky, séjourne en Suisse, plus précisément au Tessin, en 1924-1925. Pour marquer l'événement de son séjour en Suisse, le MAH s’associe au Museo Villa dei Cedri à Bellinzone. Tandis que ce dernier propose une exposition mettant l’accent sur les liens entre El Lissitzky et la Suisse, le MAH présente El Lissitzky et l’avant-garde russe. L’exposition du MAH questionne les différentes facettes de cette avant-garde, avec l’épuration des formes, propre à El Lissitzky, en opposition à une gestuelle plus expressionniste chez Ol’ga Rozanova (1886-1918), autre artiste représentative de l'avant-garde russe. Tous deux se distancient de leur «maître» Kasimir Malevitch (1879-1935), créateur du suprématisme. Cette approche permet de porter un regard nouveau sur ce fonds, soulignant sa richesse tout en valorisant cet héritage artistique exceptionnel.
Un colloque sur l’avant-garde russe, coorganisé par le MAH et le Museo della Villa de Cedri, se tiendra au MAH le 5 septembre 2025. Ce colloque est soutenu par IFPDA Foundation (New York).
Une publication sur El Lissitzy et la Suisse sortira en septembre 2025: Looking for Lissitzky. El Lissitzky und die Schweiz (1919-1929), Zürich/Bellinzona : Scheidegger&Spiess/Casagrande 2025 (septembre). Elle met l’accent sur les œuvres de l’avant-garde russe du MAH, du Kunstmuseum de Bâle et de la Graphische Sammlung ETH Zürich, trois des plus importantes collections publiques de l’avant-garde russe en Suisse, ainsi que sur Lissitzky.

Alekseï Kroutchenykh (1886-1969)
Olga Rozanova (1886-1918)
Planche 10 de Утиное гнездышко…дурныкх слов (Un nid de canard…de vilains mots)
1913
Lithographie rehaussée à la gouache sur demi-carton structuré
17,5 x 11,2 cm
Achat, 1991 ; inv. E 91-0475-012
© Musée d’art et d’histoire de Genève, photo : Jean Genoud, SA
Gros plan sur une œuvre
De 1913 à 1917, Olga Rozanova se consacre à la conception et l’illustration de livres, essentiellement ceux écrits par son mari Alexeï Kroutchenykh, considéré comme l’inventeur de la poésie zaoum. Il s’agit d’un langage transrationnel, dans lequel l’accent est mis sur le côté phonique. L’ouvrage Un nid de canard…de vilains mots se compose de 23 images et textes en zaoum. Les lettres du texte, lithographiées à la main, sont esthétiquement plus proches de la calligraphie que de la typographie. La couleur, élément majeur de l’œuvre de Rozanova, est une composante structurelle indispensable du livre. L’artiste a colorié à la main 100 des 500 exemplaires, autant les pages illustrées que celles de texte, créant ainsi un rythme dynamique. Inspirées des icônes et des manuscrits traditionnels, les images font référence aux lubki, estampes populaires, gravées sur bois et souvent coloriées à la main, au graphisme simple, produites en Russie à partir du XVIIe siècle.