En 1958, ayant appris l’existence de poèmes autobiographiques rédigés par Marc Chagall, Gérald Cramer propose de les publier dans une édition ornée par des xylogravures. Ayant déjà fait l’expérience avec d’autres projets, Cramer reste patient et persévérant, sachant que les idées qu’il lance à ses artistes prennent souvent du temps à germer. Ce n’est qu’en 1962 que Chagall commence à préparer les bois. Afin de créer un certain rythme adéquat entre texte et image et tout en évitant une rigueur trop rigide, il réalise seulement vingt-quatre xylographies pour les trente-et-un poèmes. Ces images ne se comprennent pas comme une illustration, mais plutôt comme un accompagnement visuel de l’esprit général des strophes. Parallèlement, les textes, écrits en russe et en yiddish, sont d’abord traduits littéralement par Moshé Lazar puis reformulés sous une forme poétique par Philippe Jaccottet. Les sujets abordés évoquent, d’une part, le monde russe, Vitebsk – la ville natale de Chagall – et sa famille et, d’autre part, la guerre et le monde juif. À ces deux grands thèmes, s’ajoutent des poèmes qui font allusion à l’amour, la peinture et la solitude. Publiés en 1968, les Poèmes sont récompensés en 1970 du Prix Diano Marina, l’une des plus importantes distinctions décernées dans le domaine du livre de bibliophile.